Le discours sur le VIH/SIDA est  à la mode et le VIH/SIDA est devenu pour certaines ONG une raison d’existence. Autrement dit, le VIH/SIDA est pour une catégorie des gens un « produit » efficace pour arracher l’argent aux organismes spécialisés de l’ONU. Par ailleurs, il n’est un secret pour personne que le VIH/SIDA est une source de revenu pour certaines industries pharmaceutiques.

 

            De ce qui précède, l’on peut se poser la question suivante : qui a réellement intérêt de voir un jour le VIH/SIDA  disparaître ? La personne vivant avec le VIH/SIDA sans doute et l’apologiste de la sexualité libre et libérée. En attendant que faire ?

 

            A la question de que faire, d’aucuns parlent de la prévention comme réponse, et ce faute de vaccin. Quelles sont les stratégies de préventions ? La réponse dépendra d’une personne à une autre, car chacun parle à partir d’un lieu théorique et pratique donné comme le dirait Louis Althusser.

 

            Philosophe, nous nous jetons dans l’eau pour proposer une stratégie à côté des autres et la voici : la connaissance de notre mutation épocale. Cette dernière est aussi une des causes de la propagation du VIH/SIDA.

 

            Notre société est entrée dans l’Ere de la Postmodernité et la jeunesse semble en être la première victime. Cette nouvelle ère cohabite avec la Modernité et la Tradition. D’où elle peut apparaître pour certains comme une Epoque de confusion et de fusion et où le RELATIVISME semble être le concept clé.

 

            Ceci étant et voulant interpeller la jeunesse, il sied de faire connaître à celle-ci les mutations qui s’opèrent sous ses yeux et dont elle est partie prenante. En outre, nous trouvons opportun de lui dire ce qu’est la famille dans la Tradition et la Modernité[1] et de lui montrer ce qu’elle devient durant la Postmodernité.

            Pour une bonne articulation de notre communication, nous parlerons d’abord de la famille traditionnelle et moderne ; ensuite nous montrerons comment la transvaluation des valeurs est œuvre et enfin, puisqu’il faut sauver l’humanité, nous appellerons la jeunesse à lutter contre le VIH/SIDA.

 



[1] Cette communication fut conçue pour la jeunesse congolaise (de l’école secondaire) de la Commune Rwashi à Lubumbashi en République Démocratique du Congo. Voilà qui explique son langage simple et qui ne nécessite pas une explication scientifique des mots comme Tradition et Modernité.

LA JEUNESSE DE LA

 

POSTMODERNITE FACE AU VIH/SIDA

 

Pr Abbé Louis MPALA Mbabula[1]

 

INTRODUCTION

 

            Le discours sur le VIH/SIDA est  à la mode et le VIH/SIDA est devenu pour certaines ONG une raison d’existence. Autrement dit, le VIH/SIDA est pour une catégorie des gens un « produit » efficace pour arracher l’argent aux organismes spécialisés de l’ONU. Par ailleurs, il n’est un secret pour personne que le VIH/SIDA est une source de revenu pour certaines industries pharmaceutiques.

 

            De ce qui précède, l’on peut se poser la question suivante : qui a réellement intérêt de voir un jour le VIH/SIDA  disparaître ? La personne vivant avec le VIH/SIDA sans doute et l’apologiste de la sexualité libre et libérée. En attendant que faire ?

 

            A la question de que faire, d’aucuns parlent de la prévention comme réponse, et ce faute de vaccin. Quelles sont les stratégies de préventions ? La réponse dépendra d’une personne à une autre, car chacun parle à partir d’un lieu théorique et pratique donné comme le dirait Louis Althusser.

 

            Philosophe, nous nous jetons dans l’eau pour proposer une stratégie à côté des autres et la voici : la connaissance de notre mutation épocale. Cette dernière est aussi une des causes de la propagation du VIH/SIDA.

 

            Notre société est entrée dans l’Ere de la Postmodernité et la jeunesse semble en être la première victime. Cette nouvelle ère cohabite avec la Modernité et la Tradition. D’où elle peut apparaître pour certains comme une Epoque de confusion et de fusion et où le RELATIVISME semble être le concept clé.

 

            Ceci étant et voulant interpeller la jeunesse, il sied de faire connaître à celle-ci les mutations qui s’opèrent sous  ses yeux et dont elle est partie prenante. En outre, nous trouvons opportun de lui dire ce qu’est la famille dans la Tradition et la Modernité[2] et de lui montrer ce qu’elle devient durant la Postmodernité.

            Pour une bonne articulation de notre communication, nous parlerons d’abord de la famille traditionnelle et moderne ; ensuite nous montrerons comment la transvaluation des valeurs est œuvre et enfin, puisqu’il faut sauver l’humanité, nous appellerons la jeunesse à lutter contre le VIH/SIDA.

 

1.   LA FAMILLE DANS LA TRADITION ET LA MODERNITE

 

      Nous n’opposerons pas, dans le cadre de cette communication, Tradition à Modernité[3] car les deux cohabitent.

 

                Nous entendons par famille traditionnelle celle qui est élargie et où des oncles maternels comme paternels ont un rôle à jouer dans l’éducation des enfants ou la jeunesse. Toute la société se sent responsable quant à ce qui concerne la socialisation de la jeunesse. Ainsi il ne serait surprenant de voir une tierce personne, sur la voie publique, gronder des jeunes qui se méconduisent. Par famille moderne, nous pensons à la famille nucléaire ou restreinte, celle qui, au Congo-Kinshasa, s’enferme dans une parcelle bien clôturée, protégée par le service de gardiennage ou par des chiens et dont la mention « Imbwa makali=chien méchant » fait fuir le potentiel visiteur[4]. La famille, qu’elle soit traditionnelle ou moderne poursuit un même but : former des jeunes sur qui on peut compter. Ceci justifie certains adages ou proverbes : « La jeunesse d’aujourd’hui est l’espoir de demain » et « imiti ikula e mpanga=les jeunes plantes qui grandissent constituent déjà la brousse ou la forêt ». Pour ce faire, il y aura des valeurs dont on tiendra compte et pour sauvegarder la famille et pour former la jeunesse. Parmi ces valeurs, nous en citerons quelques unes dans le cadre de notre communication.

 

            La Hiérarchie  fait partie des valeurs à promouvoir. Dans une famille traditionnelle ou moderne, la hiérarchie est de mise. Parmi les parents, le père vient en premier lieu et il est suivi de la mère, et ce d’une façon générale. L’aîné(e) est supérieur par rapports à ses frères et sœurs. La hiérarchie, comme valeur, fait appel au respect et à la reconnaissance de l’autre comme étant « supérieur ».

 

            La hiérarchie renvoie à son tour à une autre valeur, à savoir l’Autorité. Celle-ci s’exprime par des injonctions et des règles à faire appliquer dans la famille, et ce pour la réussite de la vie familiale et individuelle plus tard. Ainsi, l’autorité comme valeur exige l’Obéissance  pour sa concrétisation. Celui ou celle qui incarne l’autorité fait appel à l’impératif catégorique[5] dans son agir et se présente comme un exemple à suivre. C’est ici que le concept d’Honneur  fait irruption.

            Celui ou celle qui exerce l’autorité doit faire preuve de Maîtrise de soi. Celle-ci s’appliquera sur soi-même et sur l’extérieur. Maître de soi, celui ou celle qui guide la famille fera montre de Tempérance, de Modestie et d’équilibre dans sa vie publique et privée, et ce au niveau de l’écoute, du parler, et l’agir. Il y va de son honneur et de celle de sa famille. Par ailleurs, celle ou celui qui détient l’autorité , sera maître des événements , de la nature dans son aspect sacré et profane. Voilà pourquoi on lui reconnaît un certain savoir-faire et savoir-être qui légitimeront son autorité et l’obéissance qu’on lui doit . C’est à ce niveau que Gadamer a raison quand il fait remarquer que « l’autorité des personnes n’a pas son fondement ultime dans un acte de soumission et d’abdication de la raison (comme le croyait l’Aufklärung s’attaquant à l’autorité de l’Eglise), mais un acte d’acceptation et de reconnaissance : nous reconnaissons que l’autre nous est supérieur en jugement et en perspicacité, que son jugement nous devance, qu’il a prééminence sur le nôtre (…). Elle repose sur la reconnaissance, par conséquent sur un acte de la raison même qui, consciente de ses limites, accorde à d’autres une plus grande perspicacité (…). Ainsi la reconnaissance de l’autorité est toujours liée à l’idée que ce que dit l’autre n’est pas arbitraire et irrationnel, mais peut être compris dans son principe. C’est en cela que consiste l’essence de l’autorité que revendiquent l’éducateur, le supérieur, le spécialiste »[6].

 

            La maîtrise se soi, quant à elle, renvoie à la Stabilité comme vaaleur. La stabilité est une des caractéristiques établissant l’ordre familial, communautaire et sociétal. Autrement dit, la stabilité indique la résidence (il vit ici ou là), fait identifier l’individu par son travail (cultivateur, commerçant, enseignant, etc.), son sexe (masculin, féminin), son parti politique, etc.

           

            Par ailleurs, afin de stabiliser l’institution famille et de bien socialiser la jeunesse, on valorise les Métarécits. Ces derniers sont compris comme étant des récits sous fformes de croyances religieuses, de doctrines politiques, de mythes fondateurs, etc. auxquels on se réfère pour donner un sens à son existence, pour s’orienter dans la vie et pour faire face à certains mystères de la vie.

Toutes ce valeurs précitées concourent à l’édification de la Personnalité ou mieux de l’IDENTITÉ DE L’INDIVIDU en vue de bien  préparer le Futur. Celui-ci se prépare dans le présent qui se nourrit du passé, en ce qu’il a de meilleur.

            Disons en passant que l’Ecole, à l’Ere de la Modernité, jouait le rôle de la famille.

 

            Ces différentes valeurs sont remises en question dans l’Ere de la Postmodernité.

 

 

2. TRANSVALUATION DES VALEURS A L’ERE DE LA POSTMODERNITE

Nous savons qu’il est difficile de définir la Postmodernité. Voilà pourquoi nous préférons parler de son sens ou de sa signification.

Quant à l’origine de cette notion, beaucoup d’auteurs reconnaissent que la notion de Postmodernité est d’origine architecturale. C’est le critique Charles Jencks qui parla du postmodernisme. Celui-ci fit émerger « une architecture capable de combiner des techniques modernes avec une construction de type traditionnel. A la différence de l’architecture moderniste (…), élitiste et exclusiviste, qui ne communique pas avec les utilisateurs et n’établit aucun lien avec la ville et l’histoire, son confrère postmoderne se caractérise par un langage hybride, un « double codage », à la fois populaire et savant, afin de communiquer avec le public »[7]. Toutefois J.P. Delarge dit que le mot postmodernisme a été « probablement créé en 1960 par Daniel Bell, dans son ouvrage End of Ideology, en l’appliquant à un nouveau style architectural »[8]. Cependant, il est coutumier de penser que c’est en 1979 que le philosophe Jean-François Lyotard  conserva ce terme dans son livre La condition postmoderne.

 

Cependant, la Postmodernité est une notion apparue pour exprimer ou désigner une époque « naissante » ou une période historique dans laquelle les sociétés occidentales, en particulier, évoluent depuis un certain nombre d’années. En ce sens, elle a une signification historico-temporelle comme celles des termes « Moyen Age » et « Modernité ». Ainsi, devons-nous nous rendre à l’évidence en reconnaissant que Postmodernité est utilisée pour désigner de façon commode une époque. Pour les Postmodernistes, ces nombreux chercheurs et intellectuels tentant de comprendre et d’expliquer la condition des sociétés occidentales contemporaines à partir d’un cadre conceptuel, la Postmodernité demeure « le terme le plus représentatif du moment historique qui se déroule sous nos yeux (…). La période contemporaine ne constituerait nullement la fin de l’histoire, mais elle annoncerait plutôt une mutation importante de notre « manière d’être » ».[9]

 

Il sied de préciser que la Postmodernité ne constitue pas une négation globale de la Modernité et ne proclame pas encore la rupture radicale d’avec la Modernité. Les postmodernistes, dont Michel Maffesoli, font seulement le constat de la saturation de la Modernité, et il écrit : « Je précise que je n’ai jamais parlé de rupture, mais bien, pour reprendre l’expression de Sorokin, d’une saturation. C’est-à-dire d’une nouvelle composition à partir des éléments qui constituaient les valeurs précédentes. Mais qui, dès lors, prennent une autre forme.  En bref, non plus un social rationnel, contractuel, prédictible et tourné vers le futur, mais une socialité plus émotionnelle, façonnée par l’image et structurellement « présentéiste »[10]. . Bref, « des éléments ayant construit le corps moderne, le lien social, le contrat social, l’idée de citoyenneté, toutes ces choses qui constituaient l’idée de maîtrise, sur le monde, sur la nature, et ce à partir de quoi était faite la culture moderne (…). Il y a saturation de cette idée de maîtrise et en même temps émergent d’autres choses »[11].

 

La Postmodernité désigne l’époque contemporaine caractérisée par la saturation des grands idéaux humanistes hérités de la Modernité et qui voit émerger d’autres choses. C’est ce « voir émerger d’autres choses » qui justifie la présence de Post dans Postmodernité. En ce moment, le préfixe « Post » signifie en quelque sorte un dépassement qui intègre le passé, car comme le fait remarquer Michel Maffesoli, il y a « une nouvelle composition à partir des éléments qui constituaient les valeurs précédentes ». Le « Post » se charge d’un « au-delà » pas encore très au-delà, car il recompose les éléments ayant constitué, jadis, les valeurs précédentes ou modernes, en les adaptant à la nouvelle conjoncture sociale. La saturation provoque un réaménagement épocal, devons-nous le dire.

A la notion de Postmodernité se trouvent collés postmodernisme et postmoderne.

David Lyon, dans son Postmodernity, rappelle « la distinction entre le postmodernisme, qui met l’accent sur les aspects culturels, et la postmodernité qui concerne plutôt le social »[12]. Jean Heffer est aussi de cet avis : « Postmodernité et postmodernisme sont étroitement liés, bien que la première renvoie au social et le second, au culturel »[13]. Tout en faisant du postmodernisme un « mouvement esthétique, culturel », Dominique Colas en fait également un mouvement « intellectuel et politique censé succéder à la modernité, soit en l’accomplissant, soit en montrant la vanité, soit en la dégradant »[14]. Comme on peut le deviner, chez lui, le postmodernisme et la Postmodernité signifient la même chose. Ainsi, il parle du postmodernisme de Jean-François Lyotard[15].

 

 Le postmodernisme n’est pas à confondre à la Postmodernité même si tous les deux se réfèrent à l’épuisement de la modernité ou à sa saturation. Les deux sont, sans doute, liés mais ils abordent sous des angles différents leur objet matériel commun, à savoir la Modernité[16].

 

Quant au concept postmoderne, il y a à redire. Chez Engelhardt, postmoderne est synonyme de Postmodernité : « Quand j’emploie l’expression « post-moderne », je veux parler de l’effondrement de l’espoir de pouvoir soutenir un énoncé universel relatif au contenu de la morale. En bref, je suis d’accord avec ceux qui pensent que l’espoir des modernes d’arriver à justifier sur une base rationnelle un contenu de la moralité à l’usage des personnes humaines a échoué »[17]. Yves Boisvert utilise « postmoderne » comme un substantif et un adjectif. Substantif, postmoderne désigne le chercheur et intellectuel faisant de la Postmodernité son objet de recherche. Adjectif, postmoderne désigne les différentes caractéristiques de la Postmodernité[18]. Ainsi Jean –François Lyotard parlera de Condition postmoderne et d’autres des sociétés postmodernes « pour qualifier les sociétés occidentales d’aujourd’hui marquées par le pluralisme et la diversité croissante, et de culture postmoderne pour décrire l’attachement de nos contemporains à des valeurs telles que la promotion des droits et libertés individuelles, la volonté de choisir soi-même ses critères de vie, etc. »[19]. A la place de postmoderne au sens où  l’entend Yves Boisvert, nous utiliserons surtout postmoderniste.

 

Dans le cadre de notre communication, loin de parler de saturation , nous optons pour le concept transvaluation. Celle-ci est le fruit du Relativisme qui a pris d’assaut l’institution famille et qui a provoqué et provoque encore la fragmentation de l’identité de l’individu. De ce fait, à la place de la famille s’établit petit à petit le Néo-tribalisme. Celui-ci est une  métaphore « pour  décrire  les  rassemblements  affinitaires  qui (…)   paraissent  miter  le corps  social  (…).  Il  y a  une  multiplicité  d’affinités  électives  qui , dans  tous  les  domaines, constituent  ces micro-tribus  dont  nous  sommes  parties  prenantes  au  travers  des  diverses  institutions  auxquels  nous  appartenons »[20].

 

La jeunesse fuit la famille biologique pour s’agréger à la famille sentimentale, affective  et même religieuse. A dire vrai, elle veut expérimenter la culture du sentiment. En d’autres mots, les jeunes s’agrègent suivant les occurrences ou les désirs. L’Admiration et le Goût sont les nouvelles formes de valeurs et servent de ciment pour lier les jeunes entre eux.

A la place de l’Identité, on vit l’Identification, car les métarécits ont explosé en micro-récits dont les figures auxquelles on s’identifie ne sont plus les saints, les parents, les maîtres et les héros, mais les Madona, les Céline Dione, les Rambo, les nouveaux gourous,  les stars de film ou de publicité dont la coiffure, l’habillement, etc. servent de modèles.

 

A cause de l’identification l’autorité parentale est relativisée. La jeunesse fait plus attention aux leaders du néo-tribalisme ( pasteur, gourou, copain, copine, etc.) ; la hiérarchie se nivelle et la jeunesse se moque des aîné(e) et des anciens de qui ils n’ont rien à apprendre et prêtent plus l’oreille à leurs idoles. Les valeurs du néo-tribalisme sont recherchées . Ainsi le parler, le rire, l’habillement, la marche, la coiffure, le beau, etc. ne se réfèrent plus aux valeurs traditionnelles ou familiales.

 

De ce fait, la stabilité se transforment en Nomadisme. Ce phénomène se caractérise par le fait que la jeunesse se déplace de groupes en groupes et joue tous les rôles à la fois. Ce nomadisme est aussi d’ordre sexuel : tantôt on se considère comme homme, tantôt on se prend pour une femme. Ainsi, les hommes se coiffent comme des filles ; certaines filles se réjouissent d’avoir la barbe et certains garçons ne se gènent pas se faire percer les oreilles. L’homosexualité[21] est comme une expérience à vivre.

 

Dans ce néo-tribalisme, la maison et l’Ecole ne sont plus des lieux de lien. Par le nomadisme, on trouve d’autres lieux faisant lien. Pensons aux buvettes clandestines, aux stades, au kermès, au cybercafé, aux nouvelles églises, etc. Tous ces lieux servent d’endroits où l’on peut partager l’émotion, où on éprouve le sentiment collectif. Dans le néo-tribalisme, le  nouveau lien  ne  se base  plus  sur la  descendance  d’un  ancêtre  commun, ou encore  moins  sur  la  communauté  sanguine.  Le lien  est, au  contraire, fondé  sur  l’émotion partagée,  le  sentiment   collectif.  Il  y a  un vrai « consensus », au sens  étymologique de  cum-sensualis, « sentiment  partagé »[22]. En effet, la jeunese trouve dans ces hauts lieux la possibilité de se reconnaître tout en s’identifiant aux autres.

 

Comme on peut le voir le néo-tribalisme  est devenu un  nouveau  modus  vivendi, une  nouvelle  socialité  avec  ses  hauts  lieux.  C’est  ici  que  le néo-tribalisme  va de pair avec la thématique  de l’espace (espace,  territoire, urbanité, localisme). Cela se comprend, car la  synergie entre  espace  et  socialité  permet  d’exprimer  le fait de sentir, d’éprouver  ensemble, et cela conduit,  entre  autres, à l’hédonisme  et  à la  prévalence  de la  forme  par  rapport  au  contenu.  La socialité  dans  ce néo-tribalisme  se communique  grâce  à la  proximité  de l’espace, lequel  espace  est le  lieu  d’expérimentation  commune  même si  on  n’appartient  pas de  manière  définitive  à  ce lieu.  Ceci explique  le  nomadisme, ce  travelling  au travers  d’espaces  multiples. C’est une autre manière  de vivre l’espace.

 

Les hauts lieux du néo-tribalisme accompagné du nomadisme expriment l’Apologie du Présentéisme. D’après ce dernier, « la vraie vie est sans doute sans projet puisqu’eelle est sans but précis (…). Le présent est divin en ce qu’il est l’expression d’un « oui » à la vie »[23]. C’est le retour du carpe die ou de l’hédonisme.

 

Le Présentéisme conduit au Primat de l’image. Celle-ci est devenue une mode. L’Internet , la publicité, les films sont les nouvelles écoles de l »’image de marque ». Les personnages de l’Internet comme ceux de la publicite et des films attirent et attisent la convoitise. Le paraître l’emporte sur l’être.

 

A dire vrai, la Raison s’est transformée en valorisation du sentiment, de l’émotion, de la passion partagée.

 

Cette transvaluation des valeurs expose la jeunesse à plusieurs maux dont la transmission du VIH/SIDA, car la Postmodernité, en exaltant le corps beau à exposer, à faire envier, libéralise et relativise la sexualité et fait l’apologie de l’homosexualité sous ses différentes formes.

 

 

 

 

 

 

2.  APPEL A LA JEUNESSE POUR LUTTER CONTRE LE  

                                VIH/SIDA

 

      La jeunesse étant informée sur la transvaluation des valeurs, il ne lui reste qu’à prendre conscience du fait qu’elle ne doit pas être le jouet de différents groupes auxquels elle s’identifie.

 

      Nous pensons que la prévention contre le VIH/SIDA consiste aussi à remettre à la famille son vrai rôle et à faire comprendre à la jeunesse que le conflit des générations n’existe pas pour celui qui voit en ses parents et aîné(e)s des personnes qui se battent pour elle, et ce pour un bon futur, car la vie ne se réduit pas seulement au présent.

 

      Nous appelons la jeunesse à s’éduquer à la responsabilité et à l’engagement, à la solidarité et à la coopération, à la prévention de la violence et de l’incivilité, à la honte, à la conscience, à la raison et à la spiritualité[24], car il y va de la survie de l’humanité.

 

 

CONCLUSION

      La lutte contre le VIH/SIDA n’est pas propre aux seuls médecins et aux organismes non gouvernementaux. Mais il y a indignation quand on se rend compte que le VIH/SIDA est devenu un fonds de commerce.

 

      Sachant que le philosophe a la tête pour penser, des yeux pour voir, une bouche pour parler et des doigts pour écrire, il est de son devoir d’apporter le fruit de ses recherches pour conjurer l’ennemie VIH/SIDA qui ne le laisse indifférent devant le ravage causé.

 

      Fort de cette conviction, nous avons jugé bon de proposer notre stratégie pour combattre le VIH/SIDA. Ceci étant, nous pensons que la jeunesse sera prévenue de cette maladie si nous lui faisons connaître une des causes de la propagation de cette maladie. L’ Ere de la Postmodernité favorise cette maladie quand elle relativise la famille et les valeurs de la Tradition et de la Modernité et quand elle opère une transvaluation des valeurs.

 

       Voilà pourquoi notre appel s’adresse à la jeunesse pour faire attention, car le néo-tribalisme, le nomadisme, le culte de l’image et l’exaltation du corps n’émancipent pas l’être humain , mais le conduisent vers une chute de l’humain qui est en elle.



[1] Docteur en Philosophie de l’Université de Lubumbashi, l’Abbé Mpala Mbabula est Professeur Associé à l’Université de Lubumbashi. Ses recherches portent sur le matérialisme historique, la mondialisation, l’Altermondialisme, la modernité et la postmodernité. Il est aussi Directeur du Centre Universitaire de Kasumbalesa, Extension de l’Université de Lubumbashi.

 

[2] Cette communication fut conçue pour la jeunesse congolaise (de l’école secondaire) de la Commune Rwashi à Lubumbashi en République Démocratique du Congo. Voilà qui explique son langage simple et qui ne nécessite pas une explication scientifique des mots comme Tradition et Modernité.

[3] Nous savons que Jean Baudrillard voit juste quand il affirme que « la modernité n’est ni un concept sociologique, ni un concept politique, ni proprement un concept économique. C’est un mode de civilisation qui s’oppose au mode de la tradition, c’est-à-dire à toutes les autres cultures antérieures ou traditionnelles : face à la diversité géographique et symbolique de celles-ci, la modernité, insiste-t-il, s’impose comme une, homogène, irradiant mondialement à partir de l’Occident » (BAUDRILLARD, J., Modernité, dans Encyclopedia Universalis. Corpus 12, Paris, Encyclopaedia Universalis 1988, p.424. Signalons que Philippe Engelhard, dans L’homme mondial. Les sociétés humaines peuvent-elles survivre ? (Paris, Arléa, 1996), pense que « la modernité n’est pas l’apanage exclusif de l’Occident. Les sociétés occidentales n’ont certainement pas eu le monopole de l’Aufkärung ni de la subversion de la tradition » (p.308). Pour appuyer sa pensée, il fait appel à l’historien romantique français Michelet pour qui « de l’Inde jusqu’à 1789, descend un torrent de lumière, le fleuve de Droit et de Raison » (MICHELET, cité par Ib., p.309). Nous adressant à la jeunesse congolaise, il est facile de voir la différence existant entre une famille élargie-telle qu’elle est encore expérimentée dans le monde rural et semi-urbain – et la famille restreinte qui se retranche dans des clôtures ayant des écritures suivantes : « Imbwa makali=chien méchant ».

 

 

[4] Un proverbe dit : « Icimuti ca myunga tabayenamako nangu uli ne cintelelwe=on ne s’appuie pas contre un arbre à épines quand bien même on aurait besoin de son ombrage lors de la fatigue ». Ceci montre que les anciens préfèrent mourir de faim au lieu d’aller frapper à la porte d’un frère dont la maison porte une telle écriture.

[5] Cet impératif se formule de trois façons et commence toujours par « agis… ». La première formule est : « Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle » (KANT, E., Fondements de la métaphysique des mœurs, Traduction nouvelle avec  introduction et notes par Victor Delbos, Paris,Librairie Delagrave, 1954, p.137). En d’autres termes, avant d’agir, l’on doit se poser la question de savoir si son action pourrait être faite par tout le monde. Autrement dit, « je dois toujours me conduire de telle sorte que je puisse aussi vouloir que ma maxime devienne une loi universelle » (Ib.,p.103). C’est cela qui doit constituer, en dernière instance, le canon permettant d’apprécier moralement notre action. La deuxième formulation de l’impératif catégorique est : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen » (Ib., p. 150-151). L’on doit voir en un homme une fin et non seulement un moyen. Cela exige le respect de l’homme. L’on ne peut violer la dignité humaine. La troisième formule est : « Agis extérieurement de telle sorte que le libre usage de ton arbitre puisse coexister avec la liberté de chacun suivant une loi universelle » (KANT, E., La metafisica dei costumi, Bari, Laterza, 1983, p. 35. C’est nous qui soulignons et c’est notre traduction 19,  et  KANT, E., Critique de la raison pratique,  (Bibliothèque des textes philosophiques).  Nouvelle édition entièrement revue.Traduction par J. Gibelin, Paris, Vrin,  1965.p. 136. En d’autres mots, Kant invite l’homme à agir de telle sorte que sa volonté puisse se considérer comme étant elle-même la liberté. Il y a coexistence des libertés.

[6] GADAMER, H. G.,  Vérité et méthode, Paris, 1976,  p. 119.

 

[7] HEFFER, J., o.c.,p.230

[8] DELARGE, Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, Paris,  Ed. Gründ, 2001, 1020.

[9] - Modernité et postmodernité, texte résumé et adapté d’Yves BOISVERT, Le Postmodernisme, Québec, Boréal Express, 1995, [en ligne]http://…

[10] - MAFFESOLI, Une sociologie pour « réenchanter le monde ». Propos recueillis par Fraga Tamazi, dans Sciences de l’homme et sociétés 73 (décembre 2004/Janvier 2005), p.16.

[11] - ID., Eloge de la raison sensible, [en ligne] http://www.grep-mp.org/conferences/Parcours-15-16/raison-sensible.htm (page consultée le 13/10/2005).

[12] -David Lyon, résumé par LAMBERT, Y.,  Lyon (David), Postmodernity, dans Archives de Sciences Sociales des Religions 110 – 79 (avril – juin 2000), [en ligne] http://www.ehess.fr / centres / ceifr / N110/079. htm (page consultée le 11/08/2005)

[13] - HEFFER, J., La fin du XXe siècle. De 1973 à nos jours, Paris, 2000, p.231.

[14] - COLA, D., Dictionnaire de la pensée politique. Auteurs. Œuvres. Notions, Paris, Larousse, 1997, p.207.  

[15] Cf. Ib., p.208.

[16] - Le professeur Ulombe Kaputo qui enseigne le postmodernisme au niveau de la littérature anglaise de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université de Lubumbashi est bien indiqué pour parler du postmodernisme.

[17] - ENGELHARDT, Cité par ANDLER, D., LARGEAULT, A. et SAINT – SIMON, B., Philosophie des sciences I, Paris, 2002, p.202 – 203.

[18] Cf. BOISVERT, Y., Le Postmodernisme, Québec, Boréal Express, 1995, [en

                                 ligne]http://…

 

[19] Ib.

[20] MAFFESOLI, M., Eloge de la raison sensible, [en ligne] http://www.grep-mp.org/conferences/Parcours-15-16/raison-sensible.htm (page consultée le 13/10/2005).

 

[21] Que l’on interroge la nature qui a voulu qu’il y ait un sexe masculin et un autre féminin et que la société réponde de l’existence de l’homosexualité.

[22]   MAFFESOLI, M.,  Note sur la postmodernité.  Le lieu  fait  lien suivi de La hauteur  de   quotidien. A propos de l’œuvre de Michel Maffesoli, Paris, Le  Félin,   2003 , p 61-62 ;.

[23]ID.,  L’instant éternel. Le retour du tragique dans les sociétés   postmodernes,  Paris, La Table Ronde, 2003, p.18.

 

[24] Pour ces différentes formes d’éducation, on peut lire avec intérêt notre livre Quelles stratégies et pour quelle éducation à la démocratie en RDC ?, Lubumbashi, Ed. Mpala, 2003. Ce livre est disponible sur le site www.louis-mpala.com