La planète terre est de plus en plus menacée par des crises provoquées par les humains qui en ont les moyens, notamment le bloc des pays occidentaux. Si ces derniers s’en sont toujours sortis victorieux et l’Afrique toujours meurtrie, cette fois-ci, la menace frappe le cœur même de la civilisation occidentale dominante. Ce texte résulte de nos spéculations que nous qualifions d’osées parce que risquées à partir de l’observation, à partir des médias, des attitudes des uns et des autres humains face à cette guerre asymétrique que livre à l’humanité un ennemi insaisissable, opérant dans une clandestinité obscure, indétectable par les puissants engins d’espionnage et de guerre mis au point par les humains. 

Le contexte

Coronavirus, particule vivant minuscule et invisible à l’œil nu, désenchante même les plus arrogants des humains. Cet ennemi inattendu, probablement produit des excès humains, sera certes vaincu au prix des moyens financiers et scientifiques déployés, mais le virus ne laissera probablement pas le monde inchangé. Il augure, vu les paramètres en présence, des changements certains dans le sens d’une éventuelle révolution dans le Système-Monde. Il pourrait s’agir, à n’en pas douter, d’un bouleversement des positions hiérarchiques des blocs hégémonistes, augurant, probablement, le déclin fort perceptible de l’Occident (avec en tête les USA) après cinq siècles de domination globale et sans partage du monde, au profit d’une montée imparable de l’Orient (avec en tête la Chine émergente).

Les nombreux fanatiques (surtout africains) d’un Occident cru hyperpuissant parce qu’outrancièrement techniciste parlent déjà de la fin des temps. Mais ceux qui veulent raisonner froidement, lisent plutôt, dans ce qui se passe aujourd’hui, les signes des temps qui présage du passage de l’ère de l’hégémonie occidentale judéo-chrétienne à l’ère d’un nouvel ordre mondial consacrant la chute des uns en faveur des autres, notamment les Orientaux qui avaient, eux aussi, ployé sous le joug d’une européanisation sanglante et ruineuse du monde, mais dont ils ont su tirer des avantages stratégiques.

La présente réflexion, qui vient peut-être trop tôt, se veut modestement spéculative sur la crise suscitée par l’immixtion par surprise du coronavirus dans un monde déjà en pleine bousculade. On essaie d’abord de faire le constat des limites humaines face à une nature créée hostile contre l’homme, mais aussi de la capacité de l’intelligence humaine de transformer les hostilités de la nature, faites de crises et de chocs, en opportunités de mutations positives pour autant que l’homme profite de ces occasions pour déployer plus d’activités cérébrales cognitives. On tente par la suite de faire une projection virtuelle de ces bouleversements (déjà) perceptibles d’hégémonie au profit de ceux qui, très dynamiques, ont triché ou plagié ce qui fait la force de l’Occident dominant, en l’occurrence la techno-science d’origine européenne, au moment même où ce même Occident se découvre vieilli, fatigué, constipé et jouisseur.

Coronavirus : une guerre inclassable

Spéculations osées

Par Professeurs Emile BONGELI Yeikelo ya Ato et Micehl BISA Kibul

 

La planète terre est de plus en plus menacée par des crises provoquées par les humains qui en ont les moyens, notamment le bloc des pays occidentaux. Si ces derniers s’en sont toujours sortis victorieux et l’Afrique toujours meurtrie, cette fois-ci, la menace frappe le cœur même de la civilisation occidentale dominante. Ce texte résulte de nos spéculations que nous qualifions d’osées parce que risquées à partir de l’observation, à partir des médias, des attitudes des uns et des autres humains face à cette guerre asymétrique que livre à l’humanité un ennemi insaisissable, opérant dans une clandestinité obscure, indétectable par les puissants engins d’espionnage et de guerre mis au point par les humains. 

Le contexte

Coronavirus, particule vivant minuscule et invisible à l’œil nu, désenchante même les plus arrogants des humains. Cet ennemi inattendu, probablement produit des excès humains, sera certes vaincu au prix des moyens financiers et scientifiques déployés, mais le virus ne laissera probablement pas le monde inchangé. Il augure, vu les paramètres en présence, des changements certains dans le sens d’une éventuelle révolution dans le Système-Monde. Il pourrait s’agir, à n’en pas douter, d’un bouleversement des positions hiérarchiques des blocs hégémonistes, augurant, probablement, le déclin fort perceptible de l’Occident (avec en tête les USA) après cinq siècles de domination globale et sans partage du monde, au profit d’une montée imparable de l’Orient (avec en tête la Chine émergente).

Les nombreux fanatiques (surtout africains) d’un Occident cru hyperpuissant parce qu’outrancièrement techniciste parlent déjà de la fin des temps. Mais ceux qui veulent raisonner froidement, lisent plutôt, dans ce qui se passe aujourd’hui, les signes des temps qui présage du passage de l’ère de l’hégémonie occidentale judéo-chrétienne à l’ère d’un nouvel ordre mondial consacrant la chute des uns en faveur des autres, notamment les Orientaux qui avaient, eux aussi, ployé sous le joug d’une européanisation sanglante et ruineuse du monde, mais dont ils ont su tirer des avantages stratégiques.

La présente réflexion, qui vient peut-être trop tôt, se veut modestement spéculative sur la crise suscitée par l’immixtion par surprise du coronavirus dans un monde déjà en pleine bousculade. On essaie d’abord de faire le constat des limites humaines face à une nature créée hostile contre l’homme, mais aussi de la capacité de l’intelligence humaine de transformer les hostilités de la nature, faites de crises et de chocs, en opportunités de mutations positives pour autant que l’homme profite de ces occasions pour déployer plus d’activités cérébrales cognitives. On tente par la suite de faire une projection virtuelle de ces bouleversements (déjà) perceptibles d’hégémonie au profit de ceux qui, très dynamiques, ont triché ou plagié ce qui fait la force de l’Occident dominant, en l’occurrence la techno-science d’origine européenne, au moment même où ce même Occident se découvre vieilli, fatigué, constipé et jouisseur.

La débandade actuelle des pays occidentaux face à une menace à laquelle ils n’étaient pas préparés peut faire réfléchir. L’Occident dominant et arrogant se retrouve à la fois dégonflé et humilié. Il se retrouve aujourd’hui, ironie du sort, comme la vulgaire Afrique, contraint de compter sur l’assistance de la… Chine, pays émergent, qui a pu, sans l’aide occidentale, rapidement maîtriser cette pandémie surgie de son immense territoire. Il en est de même de la Russie ainsi que des ceux Corées qui, s’il on en croit aux chiffres officiels ont, jusque-là, réussi à éviter la propagation du COVID 19 sur leurs territoires.

Par contre, l’Italie développée, qui, il n’y a pas longtemps, conspuait les migrants des pays pauvres, allant même jusqu’à en couler les embarcations de fortune dans une Méditerranée inhospitalière à toute espèce animale non aquatique, est aujourd’hui tellement dépassée que, face à l’absence de solidarité européenne (les pays européens étant eux-mêmes frappés de plein fouet) et transatlantique (les USA, eux-mêmes atteints ont, par contre, isolé leurs alliés européens, particulièrement l’Italie la plus touchée par la catastrophe), se retrouve acculée au point de faire appel, en plus de la Chine, à l’aide de Cuba, pays pauvre étouffé par un embargo occidental depuis la Révolution castriste. Les USA eux-mêmes sont réduits à engager contre ses propres puissants alliés du bloc hégémonique occidental des batailles de masqueschinois sur les tarmacs des aéroports… chinois !

A la suite de la grande récession que ne manquera pas de provoquer la bestiole microscopique, nous invitons à réfléchir à chaud sur les sombres perspectives futures prédictibles pour notre Afrique cognitivement dormante, avec sa géante RD Congo en situation de coma intellectuel avancé. L’élite intellectuelle africaine est ainsi interpellée, mais surtout l’élite politique dont les choix politiques peuvent s’avérer désastreux pour les pays africains. C’est à elle qu’il revient la tâche de mettre un terme à ce système qui maintient l’Afrique et ses Etats dans leurs statuts de continent et Etats de merde, incapables de conduire leurs destinées vers des voies moins boueuses, plus rassurantes. Enfin de compte, que faire pour qu’émerge une Afrique plus responsable, plus autosuffisante et plus présente dans le RDV du donner et du recevoir ?

1.      Techno-science et puissance des Nations

La nature, on n’aura de cesse de le dire, n’a pas été conçue  pour faciliter la vie humaine sur terre. La Bible juive, dont raffolent les Congolais qui en font le livre le plus lu, l’exprime sans ambages dans le livre de Genèse (3 :17-19) : à la suite de la désobéissance d’Adam et Eve, supposés premiers humains, Dieu aurait jeté une malédiction sur l’espèce humaine qui vivrait difficilement sur terre, à la sueur de son front. Cependant, il dotera les humains de cerveaux qui, bien exploités, leur permettraient de domestiquer la nature en s’aménageant des conditions artificielles de survie paisible. Les peuples qui obéissent à ce commandement divin sont les plus savants, les plus forts, les mieux vivants et les plus dominateurs des autres, moins savants, plus noyés dans les visions métaphysiques et irréalistes des choses. Concrètement, ce sont les peuples qui se conforment aux prescrits divins en s’activant au travail qui sont bénis. Par contre, ceux qui passent leur vie entière à rêver des bénédictions divines sans se plier aux ordres du labeur sont visiblement maudits, si l’on s’en tient aux misères qui les rongent depuis des siècles.

Pourtant, le monde étant concurrentiel, les égoïsmes des communautés humaines et des nations font qu’ils se livrent des luttes tantôt ouvertes, tantôt larvées, les plus forts cherchant obstinément à exercer leur domination sur les plus faibles. L’histoire des pays européens fait état de plusieurs rivalités guerrières tant au sein même du Continent que dans les mémorables (pour eux) et tristes (pour les soumis) conquêtes coloniales, leur suprématie étant fonction de leurs maîtrises des connaissances technoscientifiques concrètes, qui leur conféraient des puissances réelles en matière de navigation et d’armements, mais aussi en matière de réflexions stratégiques.

Ainsi, l’hégémonie est passée de l’Espagne (qui développe l’art de la navigation grâce au recrutement des navigateurs italiens) et du Portugal dans une moindre mesure, à la France grâce à la supériorité de leurs armes (canon/mortier montés sur les navires) puis à l’Angleterre qui invente la machine, révolutionnant l’histoire par l’avènement de l’industrialisation. Quand, au début du XXème siècle, l’Allemagne se sent la plus forte de son continent, elle se découvre la vocation de dominer le reste des pays européens, provoquant ainsi à deux reprises des guerres qui ont affaibli l’Europe autodétruite et favorisé dès lors l’hégémonie américaine. Le tout, sur fond du développement de la science et de son exploitation par la technologie.

Tout compte fait, l’Occident, nonobstant ses luttes internes, a réussi à dominer le monde. Disons, de manière plus précise que les peuples européens (auquel se sont ajoutés les Japonais) ont réussi à dominer le monde, à l’européaniser, grâce à une plus grande maîtrise de la techno-science. Signalons pour le cas du Japon qu’il s’agit d’un des rares pays qui a résisté à la colonisation et qui, dès son contact avec les Européens, a pris conscience de leur supériorité effective et s’est mis à copier tout ce qui les rendait si invincibles : leurs sciences et technologies ainsi que leurs modes d’organisation politique et militaire, à l’exception de la religion chrétienne qui l’aurait certainement affaibli. Ayant participé à la seconde guerre mondiale dans le cadre de l’axe qu’il a formé avec l’Allemagne et l’Italie, le Japon, désarmé après avoir défié l’Amérique avant de capituler sous l’effet des deux premières bombes atomiques américaines (faites d’uranium extrait au Congo belge), s’investira dans une industrialisation qui en fera la seconde puissance économique mondiale après les USA pendant plusieurs décennies avant d’être tout récemment dépassé par la Chine.

Plusieurs penseurs avaient alerté et continuent de le faire sur les dangers d’un triomphe arrogant du scientisme et du technologisme sans éthique. Ils n’ont été ni écoutés, ni suivis, ni même pas considérés, tant il est établi matériellement que la science, née en Europe à partir d’une révolution dans le mode de pensée constitutive des connaissances vraies, est, avec son appendice, la technologie, la seule arme qui confère la puissance multiforme à ceux qui se l’approprient, la développent et la déploient pour l’impliquer dans leurs modes de vie qui s’en retrouvent profondément améliorés. Elle leur sert aussi à se sécuriser contre les autres peuples considérés, non sans raison, comme probables prédateurs dans un monde impitoyablement concurrentiel.

En effet, s’il est vrai que les progrès scientifiques et technologiques ont exposé nos sociétés à des dangers de tous ordres, il est tout aussi paradoxalement vrai de constater que ces mêmes progrès ont permis aux sociétés qui s’y sont déployées et impliquées de garantir à leurs populations des vies mieux vécues, plus assurées et moins incertaines que celles qui ont rêvé des destinées surnaturelles et qui, de ce fait, sont restés confinés dans des modes de pensée éloignés d’un certain rationalisme à la base de l’activité scientifique. Bien plus, les peuples les plus savants ont eu le pouvoir d’envahir et soumettre les moins savants, à l’esclavage, à la colonisation et à l’exploitation, tout en leur imposant cultures, langues et religions.

Aussi, cette techno-science permet aux humains qui la maîtrisent de mieux faire face à de multiples problèmes, tous complexes, engendrés par ses propres débordements. Il vaut donc mieux l’acquérir, cette techno-science que de lui tourner le dos en se contentant de spéculer sur leur négativité éventuelle suite à quelques nuisances qu’elle génère et qu’elle est du reste seule capable de transformer en plaisances. Les nuisances dues à son déploiement, elle seule peut aider à les surmonter.

L’Occident triomphant a dès lors induit, parallèlement aux progrès de ses puissances et prouesses technoscientifiques, des développements arrogants avec pour un mode extravagant de consommation encline aux plaisirs ludiques dérisoires. Singulièrement en matière d’armements offensifs, défensifs et dissuasifs, il excelle dans la production des armes mécaniques, électroniques, nucléaires, chimiques, biologiques et psychologiques d’extermination massive qu’il implémente à sa guise dans des foyers de tension créés pour la cause, contre des ennemis réels et fabriqués, tous hors Europe et Amérique du Nord. Il déploie également d’insoupçonnables et redoutables moyens de manipulation psychologique et d’endoctrinement idéologique des masses, moyens encore puissamment opérationnels en Afrique.

Ainsi donc va le monde, sous la domination de l’Occident scientifiquement puissant sur le reste des pays à qui sont imposés un ordre international, un droit international et ses dépendances ainsi que des institutions internationales, onusiennes ou non, bi ou multilatérales, publiques et privées, lucratives et non lucratives, scientifiques et métaphysiques… qui consacrent la supériorité occidentale globale et globalisante.

Cependant, il est des Etats non occidentaux, notamment asiatiques, jadis agressés, colonisés, exploités, meurtris et épuisés, qui ont, à force de travail, réussi à se défaire des chaînes de la domination occidentale séculaire. En effet, s’appropriant, eux aussi, cette techno-science (née et développée en Occident) devenue patrimoine de l’humanité, ces pays se sortent rudement du lot des pays périphériques pour s’imposer comme puissances émergentes face à un bloc historique occidental visiblement en décadence. Il y a singulièrement la Chine qui, en quelques décennies, a réussi à s’imposer aujourd’hui comme seconde puissance économique du monde, menaçant dès lors l’indépassable colosse américain, lui-même surpris par cette brusque poussée, consécutive à un dynamisme déterminé face au sybaritisme notoirement affiché des puissances occidentales.

Cette guerre d’hégémonie oppose aujourd’hui l’Amérique (devenue unilatéraliste) en face de la Chine autrefois autarcique, devenue paradoxalement porte-étendard du multilatéralisme institué par celle-là. L’Europe colonialiste ne se retrouve pas, surprise qu’elle est par ce duel des géants, au risque d’être elle-même piétinée. Entretemps, cette vieille Europe doit faire face à l’unilatéralisme insolent et agressif du Président américain D. Trump qui, fort de son slogan American first, n’hésite pas à malmener la coalition transatlantique. Coincée entre le diktat d’une Amérique foncièrement égoïste (qui l’entraîne dans le sillage de nombreuses inimitiés qu’elle s’est forgée dans le monde) et les nécessités de sa survie économique et de sa sécurité, l’Europe écartelée hésite à se déterminer et tâtonne en matière de sa coopération avec les voisins continentaux (Russie, Turquie), avec le Moyen-Orient (Irak, Iran, Syrie…) ainsi qu’avec la Chine, hyperpuissance en herbe.

 En interne, les pays européens sont également confrontés à des manifestations sociales contestatrices des inégalités rampantes en leurs internes, à des rébellions nationalistes au sein d’une Union Européenne inéquitable, plus favorable à ses plus riches contributeurs qu’à ses membres les moins nantis, à des montées des nationalismes anti Union européenne (cas spectaculaire du BREXIT tant convoité par d’autres petits pays désireux de l’imiter), à des controverses sur les migrants fuyant leurs pays surexploités ou mis en guerre par l’Occident-même, à des soulèvements revendicatifs des citoyens en vue de protéger le système économique européen plus socialisant contre une américanisation créatrice des inégalités…

Au même moment, il s’élève des voix du Sud, boostées par l’émergence de la Chine et de l’Inde émergentes, pour exiger un nouvel ordre mondial, une refondation de l’ONU (outil de domination au service de l’Occident), une mondialisation plus éthique, etc.

Alors que le monde se trouve déjà en ébullition dans cette guerre encore douce jusque-là, Coronavirus s’est improvisé en intrus comme un monstre invisible qui frappe indistinctement les riches et les pauvres, qui impose aux puissants une guerre contre un ennemi invisible, indétectable par les radars les plus sophistiqués, qui ruine leurs puissantes économies en les empêchant de travailler...

2.      L’Humanité en débandade face au virus (naturel ou créé en labo)

Sans nous inviter dans les débats entre les partisans ou non des théories du complot, sans non plus vouloir spéculer sur la nature de ce virus mortel, naturel ou artificiel, bornons-nous à constater que le Coronavirus est là, en roi cruel, assoiffé de cadavres, sévissant cette fois-ci contre les populations des pays riches, médicalement à la pointe des compétences et équipements. Il attaque tous les humains sans distinction, terrorisant rois et reines, princes et princesses, élites et masses, politiciens et religieux, soignants et non  soignés, croyants et non croyants... Cette créature microscopique fait parler d’elle dans les unes de tous les médias du monde, si bien qu’on a presqu’elle a fait oublier les nombreuses victimes des guerres commanditées par les marchands (occidentaux) d’armes dans le monde, d’ebola, des têtes égorgées du Nord-Kivu et de l’Ituri… sans parler des pertes humaines dues à des maladies courantes, dites négligées (?) d’Afrique.   

Dans l’imaginaire populaire des pays pauvres ou, mieux, appauvris d’Afrique, covid19 constitue une menace imminente contre les pays riches, l’Afrique, non encore massivement atteinte, s’employant tant bien que mal à éviter une probable contamination potentiellement catastrophique pour elle et ses populations. Pour une fois, la maladie provient des pays riches, surmédicalisés, propres, intelligents, puissants, organisés, dotés des moyens de défense sophistiqués, mais toutes qualités inopérantes face à une bestiole imprenable, indétectable ! Les nombreuses ONGs occidentales, humanitaristes, médiatiques, urgentistes et friandes des événements malheureux commandités dans les pays périphériques, deviennent aphones, inopérantes quand ce sont leurs propres pays, sources de leur financement, qui sont, cette fois, frappés au cœur même de leur civilisation mirobolante !

L’Occident, habituellement suffisant et arrogant, se retrouve subitement affaibli comme jamais auparavant depuis 1945. Divisée, non solidaire, déboussolée et affaiblie, l’Europe exhibe l’extrême fragilité d’une Union européenne plus économiciste que politique et sociale. Or, une solidarité artificiellement fondée sur les froids calculs égoïstes des uns et des autres s’effondre chaque fois que surviennent des situations qui exigent plus de sentiments d’affectivité, plus d’empathie. Hier, c’était la Grèce qui a eu à subir la rigueur méchante des insensibles lois financières d’une Union européenne non solidariste. Aujourd’hui c’est l’Italie, 3ème puissance économique de l’Union européenne qui se retrouve acculée, sans secours de ses alliés (ses faux frères) européens et contrainte de recourir à l’aide de la lointaine et étrange Chine, de l’éternel ennemi Russe, ou encore du… pauvre frère latino-américain qu’elle n’a jamais pensé défendre face l’injustifiable tyrannie américaine ! L’Allemagne, où la pandémie se propage sans cumuler des centaines de décès journaliers comme ailleurs, refuse de partager son expérience avec les autres Européens, refuse de secourir les autres, même pas en exportant le matériel de réanimation manquant chez le voisin direct italien en détresse, acculé dès lors à quémander, comme un vulgaire pays africain, auprès des détestables chicons, des communistes russes, des pauvres indiens, des minables marxistes cubains... Les USA avaient d’ailleurs anticipé en bloquant tout contact avec l’Europe (en prime l’Italie surinfectée) alliée au sein de l’OTAN, elle-même devenue aphone et dont les équipements et stratégies sophistiqués ne peuvent rien contre un ennemi viral.

La démocratie occidentale est mise à mal et, curieusement, ce sont les régimes dictatoriaux qui semblent mieux s’en défendre. La solidarité européenne vole en éclat : en effet, les pays qui se sont toujours mis d’accord pour exporter les guerres et ramener les richesses se retrouvent dans des impasses inexplicables face à une catastrophe sanitaire !

En Chine, lieu de la survenue de la pandémie, et dans les autres pays asiatiques touchés, on s’organise pour la reprise, alors que l’Europe et l’Amérique s’enlisent dans le comptage macabre des milliers de décès quotidiens comme en temps de guerre, mais ici d’une guerre sui generis, sans crépitement des balles ni d’éclats bruyants de bombes larguées par des engins de mort redoutables, mais tous paralysés par la bestiole qui tue en silence. Des polémiques intra et inter nationales fusent de partout sur les protocoles de soins, pour ou contre les molécules de chloroquine, sur les mesures de confinement, sur les prévisions d’aide aux entreprises frappées par la pandémie, sur les vaccins éventuels… En France, on assiste à de honteuses querelles franco-françaises des savants sur la Chloroquine, semblables aux amusantes polémiques des musiciens congolais en quête de vedettariat… L’OMS (dont allures affairistes sont de moins en moins discrètes) se mêle au débat avec ses validations négociées avec les fabricants des médicaments. Etc.

L’éthique médicale est bafouée par nos donneurs de leçons occidentaux, champions des droits humains : on sélectionne les malades, on euthanasie les personnes âgées, on refoule les patients de couleur autre que blanche (ça se dira, ça se saura !), on refuse d’administrer un produit (chloroquine) qui sauve en fonction des humeurs des savants en compétition et des intérêts marchands en jeu, on filtre les informations, on politise les carences des gouvernements, on viole les droits des malades, on refuse de se communiquer les expériences, etc.

Il s’observe à l’occasion un séisme qui secoue les institutions démocratiques européennes et transatlantiques dont on perçoit aujourd’hui l’extrême fragilité. Les Etats-Nations que prétendaient anéantir les institutions libérales mondialisantes s’éveillent et reprennent le flambeau de la lutte contre la pandémie. Toutes les règles rigides des institutions financières de la mondialisation volent en éclat et les nationalismes s’éveillent pour des auto-prises en charge confinées. Toutes les négociations, revendications, grèves et réformes entreprises sont suspendues. Etc.

Bien plus, l’Occident découvre les failles de ses systèmes de santé immodérément libéralisés et privatisés. Aux USA (devenus épicentres de la propagation du virus satanique), par exemple, près de 40 millions de citoyens n’ont pas accès aux soins de santé, faute d’assurances que voulait instituer l’Administration Obama, contre l’avis des Républicains acharnés avec le Président Trump. En Europe, on manque même de quoi se protéger contre les contaminations, exposant dès lors le corps des soignants à des contaminations massives. Cette détresse commune aurait pu les unir dans le cadre d’une lutte commune pour éradiquer la pandémie.

3.  Et si Marx avait raison ?

Karl Marx avait prévu que le capitalisme allait s’autodétruire à force de cultiver la boulimie du toujours plus gagner. Moqué de tous les théoriciens fonctionnalistes organiquement produits par le système libéral, c’est pourtant aux pays qui ont cru en ce philosophe diabolisé que viendra la concrétisation de sa prophétie.

En effet, la douce stratégie de Pékin pour désindustrialiser les pays occidentaux a été d’une simplicité cinglante. Pour les assoiffés occidentaux de gains, la Chine a déployé un système éducatif extrêmement performant qui lui a produit des techniciens de haut niveau. Cependant, les techniciens et experts chinois formés au standard occidental acceptent, pour les mêmes fonctions et les mêmes rendements (si pas plus, étant donné l’esprit chinois du Yukong), de faibles rémunérations et s’abstiennent des revendications syndicales comparativement à leurs homologues occidentaux de même niveau, trop exigeants en la matière. L’appât du gain par la diminution des coûts de gestion des ressources humaines et par l’absence des réclamations sociales ainsi que l’espoir de conquérir le très vaste marché chinois (plus du milliard de consommateurs) pousseront les industriels euro-américains à délocaliser leurs divisions de production concrète, faisant de la Chine un simple mais géant atelier de fabrication des biens conçus dans leurs pays respectifs.

C’était sans compter sur le génie stratégique chinois qui, foulant aux pieds le droit occidental de propriété intellectuel et violant les règles occidentales de protection des brevets de fabrication, s’activera à percer les secrets de production des usines délocalisées dans leur territoire, à les plagier puis à en perfectionner les méthodes de production. Ils réussirent ainsi à faire passer la Chine du stade d’atelier d’assemblage des produits conçus en Occident à celui de laboratoire de conception des biens industriels et virtuels, produits et vendus à bas prix au monde entier, y compris dans les pays développés. A l’instar de l’Afrique sous-développée, mal organisée, apuvre et dépendante, l’Europe se découvre, à l’occasion de cette crise, désindustrialisée, dépendante, importatrice des denrées même stratégiques comme aujourd’hui les masques de protection, les tests de dépistage des maladies, les produits pharmaceutiques, les respirateurs et autres gadgets médicaux... En fait, l’Occident dépend de la… Chine pour les biens de première nécessité, même sanitaire. Trump avait donc raison de dénoncer les revers d’une mondialisation qui devenait ruineuse pour son pays, mais on s’en est aperçu tardivement. Le confinement qui signe l’arrêt de plusieurs entreprises occidentales qui ne savent plus exporter leurs denrées alimentaires en Chine a fait apparaître celle-ci comme le nouvel épicentre de la mondialisation multilatéraliste, n’en déplaise à Donald Trump médusé, avec ses USA devenus protectionnistes unilatéralistes, face à une Europe dépaysée et surprise par la survenue d’un nouvel ordre international qui oppose deux géants qui l’excluent de l’enjeu.

Une occasion de marquer encore plus un bond de plus face à la léthargie occidentale est offerte à la Chine. En effet, en réussissant à vite maîtriser la pandémie dont elle a constitué le point de départ, la Chine vient d’amorcer le processus d’arrêt de confinement intégral, ce qui lui parmet de relancer son économie productive des biens pour toutes les Nations, au moment où l’Occident continue à enterrer ses morts comptés quotidiennement par milliers, à renforcer les mesures de confinement, à restreindre les activités productives... Cela ne manquera pas de creuser des écarts considérables en termes de croissance et de décroissance économiques, chères aux économistes libéraux. Avec ces opportunités mises à profit par la Chine, quel pays occidental oserait encore contester l’intrusion de HUAWEI et sa 5G, fortement combattue par Donald Trump ? Ou encore, n’est-ce pas là une voie grand’ ouverte pour la route de la soie, initiative chinoise encore boudée par une Europe occidentale aujourd’hui mise à genoux par COVID 19 et contrainte d’attendre le secours de la Chine ?

La Chine, qui s’est lancée massivement dans les recherches sur l’intelligence artificielle, dans la conception et la production des avions de ligne jusqu’ici réservées à Boeing (américain) et Airbus (franco-européen), qui monopolise déjà la manufacture mondiale… le Chine, disions-nous, semble en position ou en voie de détrôner, avec ses pairs asiatiques, les Occidentaux : des Noirs controversés de l’époque pharaonique(C.A. Diop), le monde est passé aux siècles de la domination blanche ; le coronavirus pourrait faire basculer ce monde sous la domination jaune (le péril jaune tant redouté !).

Effectivement, cette crise, au départ simplement sanitaire, dévoile l’extrême fragilité du vieux Monde, aujourd’hui fébrile, vulnérable, qui exhibe sa surprenante dépendance à l’égard de l’Orient pour si peu. On voit donc clairement la faiblesse avérée d’un Occident dominant, pédant, hautain, cynique… face à une Chine hier sous-développée, aujourd’hui émergente et demain, probablement, nouveau maître du monde, disposée, comme me l’avait dit un diplomate chinois à Kinshasa, à administrer une leçon d’humanisme à l’Occident chrétien dont le règne hégémonique draine un bilan si lourd en terme de massacres des populations, de sous-développement, de guerre, de pauvreté et de misères pour l’humanité.

La Chine ne devient-elle pas la bienfaitrice des temps qui s’annoncent durs pour le vieux monde ? Comment ne pas y penser lorsque nous voyons les maîtres du monde durant plus de cinq siècles, se livrer à des coups tordus et des hold-up pour se disputer, sur des tarmacs des aéroports chinois, des masques, médicaments et autres équipements chinois ? On voit les dirigeants des pays qui nous ont toujours empêchés d’approcher la Chine médiatiser sans retenue (et même avec fierté) les commandes des biens de première nécessité sanitaire passées aux entreprises chinoises qui n’hésitent pas à les opposer ?

Et si l’ancien Chef de l’Etat congolais avait raison de s’orienter, comme tous les autres sans exception, vers la Chine, choix politique que les intellectuels congolais puant l’odeur du père occidental ont combattu avec des acharnements irrités et immodérés ? Dans tous les cas, qu’on le reconnaisse ou pas, en fustigeant en méconnaissance de cause les contrats chinois, la RDC a perdu ce que l’Occident décadent ne pourra jamais  compenser ! Et ce que nous avons lâché au moment où la Chine avait fort besoin de séduire le monde, nous ne saurons point le récupérer au même prix en ce nouveau moment où tout le monde veut séduire la Chine, qui pourrait, dans ce cas, devenir pédante !

Toutefois, les épidémies modernes ne font plus autant des ravages que ceux connus les siècles passés. A l’époque, on se fiait à des religions et autres croyances, incapables, comme aujourd’hui, des moindres remèdes pour épargner l’humanité face aux méchancetés de la nature. Il n’y a qu’en RDC où les hommes de Dieu autoproclamés ainsi que d’autres gourous mystico-politico-religieux peuvent encore se faire accepter dans leur commerce d’illusions prophétiques. Tous les yeux avisés, tous les espoirs des peuples intelligents sont aujourd’hui braqués sur les scientifiques qui sont mobilisés dans la tâche de lutte contre la pandémie. On sait que, grâce à la science, on finira par éradiquer, ou du moins à stopper les affres du COVID 19.

Cependant, les yeux de tous, y compris ceux de l’Amérique dégonflée et désillusionnée, sont curieusement tournés vers la… Chine. Nous comptons tous sur des chinoiseries : leurs masques de protection commandés ou quémandés en termes de milliards d’exemplaires, leurs appareils de réanimation attendus d’urgence, les médicaments sortis de leurs chaînes inégalés de fabrication rapide (aidée en cela par l’Inde voisine, un autre géant asiatique en émergence hégémonique), leur expertise avérée en urgences sanitaires, leur offre de coopération plus humanisée, leur empathie vis-à-vis des pays aujourd’hui sous emprise occidentale, leur paradigme du win-win dans les transactions de coopération avec les Nations du monde, etc. !!! La Chine ne ratera certainement pas cette opportunité sanitaire pour s’implanter même là où, hier, sous pression occidentale, on n’en voulait pas. Tout le monde court et courra davantage derrière elle et ses chinoiseries, cette fois bienfaisantes.

Enfin, relevons que le coronavirus ne s’en ira pas, d’après nos impressions, sans laisser des stigmates institutionnels, ni sans poser des questions philosophiques existentielles à l’humanité tout entière. Et l’Afrique devrait réfléchir sur les opportunités en présence pour explorer les possibles horizons à mettre en œuvre pour son émancipation effective, à moins de prendre l’option suicidaire de couler avec ses parrains occidentaux.

4. Et l’Afrique des croyances primitives dans cet imbroglio ?

On le sait, depuis la rencontre avec les esclavagistes européens il y a 5 siècles,  l’Afrique a toujours vécu comme appendice de l’Europe, elle-même à la fois esclavagiste, évangélisatrice, colonisatrice, décolonisatrice, recolonisatrice, coopératrice, mondialisatrice, humanisatrice, secouriste, bienfaitrice, civilisatrice, modernisatrice, éducatrice, salvatrice, consolatrice, sécurisatrice, exploitatrice, (de)stabilisatrice, paternaliste, etc. C’est l’Europe qui, en rapport avec ses intérêts, a décidé d’esclavagiser, de christianiser, d’émanciper, de coloniser, de civiliser, d’exploiter, de libérer, de recoloniser, de coopérer, d’aider, de nourrir, de soigner, d’appauvrir et de… mondialiser les Noirs d’Afrique. Ces derniers ont dit oui à tout et les décisions cardinales pour leur survie ont toujours été prises en Occident. les dirigeants africains ont toujours cherché leur légitimité en Occident et les rebelles parmi eux ont toujours été soit démis, soit éliminés purement et simplement (Lumumba, Nkrumah, Sankara, Laurent-Désiré Kabila, Kadhafi…), sans parler des leaders historiques congolais, tels Kimpa Vita, Msiri, Simon Kimbangu et autres héros dans l’ombre.

Ironie du sort, l’Europe dont l’Afrique se complait toujours à être le bébé s’affole face la guerre sanitaire lui livrée par coronavirus qui la terrorise, la paralyse, la rend impuissante et, curieusement, humble. On comprend dès lors le désarroi de la communauté africaine mentalement confinée dans l’attentisme cérébral pour trouver remèdes aux maux qui la rongent. Aujourd’hui, l’Europe de tous les rêves devient le lieu sale, source de multiplication virale, tandis que l’Afrique est devenue ce lieu pur et sûr, où il fait plus sûr de vivre. L’horreur de recevoir un hôte venu de l’Europe est aujourd’hui partagée par tous, alors qu’hier, c’était un honneur. Hier, il était rassurant d’avoir un frère en Europe ou d’avoir un ami blanc ; aujourd’hui, c’est devenu un sujet d’inquiétude. A Kinshasa et dans les autres villes du pays, on dénonce avec méfiance tous les revenus de l’Europe, suspectés d’être porteurs du virus mortel. Les hôtes en provenance de l’Europe se camouflent systématiquement, tout le contraire de leur exhibitionnisme d’hier. Comme le témoigne cet incident survenu à un convoi de Blancs revenant de Moanda pour être rapatriés en France et en Belgique, les habitants des quartiers chauds de la Tshangu, conscients de ce que le virus trouve son épicentre chez les Blancs, ne pouvaient laisser passer, sans arrêter leur progression dans la ville à leur manière, ces suspects revenants de l’aéroport international officiellement fermé à tout trafic international à l’exception des aéronefs effectuant des vols cargos.

Bien plus, il est aujourd’hui établi que l’Europe en crise dépend, pieds, mains et cerveaux liés, de la Chine, exactement comme l’Afrique damnée compte, corps et âmes liés, sur cet Occident, son partenaire historique, qui, jusqu’ici lui interdit de coopérer avec ces chicons avec leurs sournoises chinoiseries. On a vu les légèretés dans les façons dont les intellectuels congolais, ridiculement sous manipulation occidentale, avaient fustigé les contrats chinois sans les avoir lus !

Cependant, allons-nous profiter de cette opportunité pour nous ressaisir, étant connu de tous que les temps de crises constituent ces moments rares où toutes les intelligences convergent pour que collectivement on les surmonte de façon durable ? Que faisons-nous pour promouvoir notre autonomie en cas de crise ? La question vaut son pesant d’or car, en ce moment où les tuteurs occidentaux sont eux-mêmes en désarroi, ils ne sauraient s’occuper de nous, leurs priorités étant focalisées sur leur propre détresse. Est-ce en ordre dispersé, en individus isolés, en experts confinés que nous allons faire face à nos nombreux défis ? Ne pouvons-nous pas nous ressaisir pour redéfinir nos rôles, reconfigurer nos liens de collaboration (et non d’antinomie) avec les pouvoirs publics, reconsidérer les paradigmes antérieurs pour en créer de nouveaux répondant à nos problèmes existentiels ? Allons-nous laisser nos économies dépendre éternellement des rentes minières, pétrolières et agricoles sans valeurs ajoutées africaines ? Sommes-nous condamnés à dépendre des importations extérieures en tous produits, même alimentaires ?  Le débat est et reste ouvert.

A ce propos, qu’il nous soit permis de nous inviter à approfondir d’abord ces mots de Robert Greene pour qui veut atteindre l’excellence :

« Quand nous prenons notre temps et que nous nous concentrons de façon intense, quand nous sommes convaincus que des mois et des années d’efforts nous conduiront à la maîtrise, nous nous servons de la structure intime de cet instrument merveilleux qu’est notre cerveau, résultat de millions d’années d’évolution. Nous continuons infailliblement à évoluer vers des niveaux de plus en plus élevés d’intelligence. Nous voyons les choses les choses de façon plus profonde et réaliste. Grâce à la pratique, nous épanouissons nos compétences. Nous apprenons à penser par nous-mêmes. Nous devenons capables de gérer des situations complexes sans nous laisser déborder. En suivant ce chemin, nous devenons des Homo magister, l’homme ou la femme qui atteint la maîtrise.

Dans la mesure où nous croyons pouvoir sauter les étapes, échapper au processus, obtenir du pouvoir d’un coup de baguette magique par des relations politiques, des astuces faciles ou nos talents naturels, nous allons contre la structure intime de notre cerveau et nous allons au rebours de nos vrais pouvoirs. Nous devenons les esclaves du temps : nous nous affaiblissons, perdons nos capacités en enfermons notre carrière dans un cul-de-sac. Nous devenons prisonniers des opinions et des peurs des autres. Notre esprit, au lieu de nous mettre en connexion avec la réalité, se débranche et s’enferme dans un cadre de pensée exigu. L’homme, qui dépendait pour sa survie de sa capacité de concentration, devient un animal distrait, incapable de réflexion profonde et en outre privé du secours de son instinct ». (Robert Greene, Atteindre l’Excellence, Alisio, Paris, 2014, pp. 9-10)

On pressent bien qu’en nous privant de l’usage raisonné et stratégique de nos cerveaux, nous sommes réduits à rester prisonniers des opinions et des peurs occidentales. C’est ce qu’ont compris les Asiatiques. Quand on s’en prenait à l’autarcie de la Chine sous Mao qu’on tournait en dérision, ce géant asiatique se préparait à l’autonomisation pourvoyeuse de la puissance hégémonique aujourd’hui acquise. Le Français Alain Peyrefitte avait vu le monstre venir lorsqu’il en avait alerté les siens distraits, accrocs aux loisirs hédonistiques : Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera. Dans sa thèse de doctorat sur le système éducatif national, Bongeli[1] avait, sans être compris, alerté sur les performances du système éducatif chinois, méprisé et dénigré à l’époque, mais aujourd’hui coté comme meilleur du monde !

Comme nous ne pouvons guère survivre en nous comportant comme des animaux domestiqués et enfermés dans des cages avec des réflexes des chiens de Pavlov agités par les manipulateurs extérieurs, aujourd’hui occidentaux, demain probablement chinois, nous estimons le moment venu pour ressusciter Mabika Kalanda, dont la relecture s’avère cruciale pour une remise en question stratégique de nos façons de concevoir les réalités, selon les objectifs de ceux qui nous ont préparés, façonnés, formatés pour être, sans eux, experts en incompétence sur tout ce qui nous concerne. Le suivisme qui n’a guère servi l’Afrique l’a, par contre maintenue dans une cécité mentale préjudiciable. Jusque-là, nous nous contentons de jouissances partielles et éphémères résultant des efforts des autres que nous mimons sans effort ni intelligence. Cela nous conduit à vivre comme des robots cybernétisés, vulnérables aux moindres chocs non programmés. Sommes-nous condamnés à vivre dans des cages mentales comme des chiens domptés pour la garde des intérêts et des jouissances des autres ? Rien, alors absolument rien ne peut nous dédouaner des efforts de réflexions centrées sur tout ce qui nous concerne. Mabika Kalanda nous en avait pourtant prévenus.

.En effet, dès les premières années qui ont suivi l’accession du pays à son semblant de souveraineté, Mabika Kalanda[2] avait prédit (presqu’en prophète réaliste) la situation préoccupante et apparemment sans issue que vit la RDC en ce jour. Ces prédictions se sont révélées exactes parce qu’elles étaient élaborées dans le cadre d’un paradigme critique qui a permis de relever, sans complaisance, la situation réelle telle qu’elle se vivait concrètement et non telle qu’on s’obstinait à faire croire par ceux-là mêmes qui avaient imaginé ce système d’enlisement du pays en le maintenant dans des voies marécageuses. Il faut donc relire Mabika Kalanda pour comprendre les raisons de cette situation de notre Nation aujourd’hui déprimée, avec des effets néfastes notoires sur ses populations. Avec les mots des années soixante, ce savant oublié avait anticipé dans la description de l’actuelle RDC décolonisée, recolonisée, dictatorialisée, zaïrianisée, transitionnalisée, divisée, dialogisée, démocratisée, sur-tribalisée, mondialisée… Cette situation vaut, d’ailleurs, pour toute l’Afrique noire. Toujours soumise aux velléités extérieures, aujourd’hui occidentales, l’Afrique (avec en prime la RDC) risque de se retrouver demain, toujours fragile, dans les bras chinois quand la Chine reprendra le flambeau de l’hégémonie mondiale. 

Mabika Kalanda fut donc ce visionnaire qui avait commis le tort d’être fort en avance sur son temps. Le philosophe E. Kabongo Malu qui, dans un ouvrage récent, s’est exercé à rendre compte de l’actualité de la pensée de Mabika Kalanda, écrit :

« L’urgence s’impose de procéder à l’évaluation de l’impact de la pensée de MK sur les nouvelles générations, les inflexions de sa pensée sur le cours de l’histoire congolaise, et cela, par une relecture de La remise en question, susceptible de mettre en exergue la centralité de ce texte fondateur de la bibliothèque congolaise dont les filiations sont fécondes et emblématiques et dont le propos est toujours d’actualité, dans le contexte d’un pays en déconfiture politique, économique et culturelle… La pensée kalandienne est plus que jamais d’une actualité brûlante, voire existentielle. » (in Mabika Kalanda et l’échec de l’édification nationale au Congo-Kinshasa. Elites, conscience et autodétermination, Editions universitaires africaines, Kinshasa, 2019, p. 19).

Enfin, nous estimons que seul un travail cérébral collectif de recherche scientifique pourrait nous booster vers des hauteurs souhaitées, afin d’assurer à nos pays leurs souverainetés politiques respectives, elles-mêmes pourvoyeuses des souverainetés culturelles, économiques, alimentaires et... sanitaires. Ces nécessités sont vitales pour assurer la survie nos Nations et les nôtres comme individus.

Intellectuels africains, où sommes-nous ?

Kinshasa, le 04/04/20.



[1] Emile BONGELI Yeikelo ya Ato, L’université contre le développement au Congo-Kinshasa, thèse de doctorat à l’Université de Lubumbashi défendue en 1983 et publiée en 2009 par L’Harmattan, Paris.

[2] La remise en question. Base de la décolonisation mentale, Bruxelles, 1966.