Le philosophe n’est pas cet homme qui, regardant de sa fenêtre le naufrage du bateau, devient le témoin pour raconter ce qu’il a vu. Le sens d’être du philosophe, dans le cas sous examen, est de voir le sens ou la direction que prend l’histoire humaine afin de lui donner un autre sens, celui de la signification, et ce en proposant une piste de solution , car , à la suite de Wittgenstein II, le philosophe a le rôle de montrer à la mouche la voie de sortie de la bouteille. En effet, en appliquant le paradigme de la simplicité dans la gestion de la res publica, les principes de race et de différentiation nous ont fait entrer dans une « bouteille » dans laquelle nous nous battons et dans laquelle la Covid-19 est venue empirer notre situation infrahumaine. Pour donner une « nouvelle orientation » ou une « signification » à notre vivre-ensemble, le philosophe Emmanuel Banywesize Mukambilwa, nous montre le chemin, celui de la Politique de l’humanité fondé sur l’Humanisme unidiversal, fruit du paradigme de la complexité. Voilà l’essence du philosophe, voilà son sens d’être, voilà sa nature sans laquelle il ne serait pas philosophe, nature résumée en ceci : voir beaucoup, entendre beaucoup, lire beaucoup et voir tout, après, sous un nouveau soleil, celui de la Politique de l’humanité assise sur l’Humanisme unidiversal, une autre voie de l’Humanisme régénéré prôné par Edgar Morin.

 

 

 

 

LE SENS ET L’ESSENCE DE L’EXISTENCE D’UN PHILOSOPHE

ou

Cogitations sur le livre d’Emmanuel BANYWESIZE ( Philosophe épistémologie congolais), « En finir avec la politique de différence en Afrique : leçons des mouvements sociaux et de Covid-19 »

 

 

 

 

 

 

 

            Philosophe engagé de par ses activités scientifiques, le Professeur Ordinaire Emmanuel Banywesize Mukambilwa a publié aux Editions du Cygne de Paris en 2020, un livre intitulé En finir avec la politique de différence en Afrique : leçons des mouvements sociaux et de Covid-19.

            Ce livre a attiré mon attention. D’où cette recension ou note de lecture.

            De par le titre, le philosophe épistémologue de l’Université de Lubumbashi se pose la question de savoir comment et pourquoi en finir avec la politique de la différence en Afrique, et ce en partant des leçons tirées des mouvements sociaux et de Covid-19. La question posée se décline aussi en ces termes : serons-nous dignes de garantir « notre destin, notre espace commun, notre vivre-ensemble, celui de nos enfants et de nos descendants [qui] est entre nos mains [ ?] »[1].

            A cette question pertinente, l’Auteur donne une Réponse sous forme de PARI : « … nous faisons le pari de penser ensemble et de matérialiser la politique de l’humain ( je souligne) qui promeut la dignité de l’homme, de tout homme, l’égalité, la justice, le vivre-ensemble et la vie bonne pour tous comme valeurs suprêmes et incessibles ( je souligne) »[2]. De ce fait, l’on saura suivre l’Idée se profilant dans le livre dénonçant « la différentiation ethnique, culturelle ou raciale instituée en projet politique et en horizon indépassable du vivre-ensemble, en Afrique et dans le monde »[3] et qui a pour conséquence la Fragmentation de l’humanité et l’instauration du règne des violences dans les sociétés. D’où, le but que poursuit l’Auteur, celui de « penser la politique de l’humain articulée sur l’humanisme unidiversal »[4]. Il s’agit de l’humanisme qui inclut en son sein l’unité et la diversité et qui engendre l’universalité ; d’où unidiversal. Ce dernier, l’humanisme unidiversal,  est son cheval de bataille pour abattre la politique de différentiation.

            Pour bien mener à bon port et gagner son PARI, l’auteur fait appel à une triangulation méthodologique combinant la « phénoménologie », compréhension d’événements ou des faits « tels qu’ils apparaissent, se succèdent et affectent l’humanité »[5] qui n’est rien d’autre que la sociologie du présent et « l’approche complexe »[6] relevant du paradigme de la complexité à l’assaut du « paradigme de la simplicité »[7], ancrage des discours sur l’altérité, et donc inspirateur de la logique de domination et de la fragmentation de l’humanité. En outre, cette triangulation méthodologique se munie d’un arsenal de techniques de recherche sui generis, à savoir l’humour, le banal, les langages énigmatiques (au travers parfois de la musique populaire et des postures des jeunes »[8]), la conversation des cafés, terrasses, bars, trottoirs tout en questionnant les discours et les savoirs.

            Livre ciblant toute personne qui sait lire et, écrit en un style simple et limpide, En finir avec la politique de différence en Afrique : leçons des mouvements sociaux et de Covid-19 est un trésor des concepts comme humanisme unidiversal, afropolitanisme, entropologique, biogée, capitalocène, les en bas d’en bas, génération morale, politique de l’humain, responsabilité du périssable, etc.

            Pour gagner son Pari, l’Auteur s’entoure des alliés scientifiques dont Edgar Morin (son maître à penser), Valentin Yves Mudimbe, Souleymane Bachir Diagne, Michel Maffesoli (son Père intellectuel), Kaumba Lufunda, Achille Mbembe, Kassereka Kavwahirehi, Charles-Zacharie Bawao, Massolo, et tant d’autres. Ainsi sa documentation est actualisée jusqu’à 2020.

            Son livre est divisé en quatre chapitres, et ce en vue de bien argumenter pour gagner son Pari.

            Le premier chapitre intitulé Autoritarisme et résistance sociale cherche à déceler le sens et le pouvoir de la résistance sociale. Les mouvements citoyens, diversement dénommés d’un lieu à l’autre (« Nuit débout » et « Gilets jaunes », en France, « Y’en a marre » au Sénégal, « Ballai citoyen », au Burkina Faso, « Lucha » et « Filimbi » au Congo Kinshasa, « Hirak », en Algérie[9]  et qualifiés « foules » par le pouvoir[10], constituant, en dernière analyse, la voie de sortie de l’autoritarisme (abus de l’autorité empiétant sur les libertés, statu quo de l’ordre socio-économique inégalitaire) et de la mauvaise gouvernance ; en outre, ils exigent  l’alternance politique. Pour ce faire, ils utilisent « plusieurs modalités d’ajustement et de désajustement au réel politique »[11], messages sur les réseaux numériques, surgissement intempestifs, sit-in sur la place publique, tracts, graffitis, chansons, vidéos, participation politique, slogans. Par ailleurs, ils mènent des actions de résistance. Ils sont l’expression de la puissance du « social instituant », souverain primaire, se posant en s’opposant au social institué, le pouvoir d’en haut. Revendiquant une place dans l’espace de légitimité sous contrôle des partis et des organisations de la société civile, les mouvements citoyens, au dire de l’Auteur, « se posent comme des hérauts de la légitimité de la puissance sociale d’en bas, celle des « citoyens ordinaires » »[12]. Prenant à contre-pied l’opinion de Platon selon laquelle le peuple ne connait pas ce qu’il veut, ils se constituent en « contre-pouvoir par la praxis qui permet de transformer le politique : la participation citoyenne »[13]. Bref, leur capacité à transformer l’impuissance individuelle des citoyens ordinaires « en puissance sociale pour l’instauration de la démocratie participative »[14] opposée à la démocratie consensuelle et ethnocratique, constitue leur POUVOIR.

            De ce qui précède, l’on comprendra le sens et le pouvoir de la résistance sociale : combattre bec et ongles la rémanence des autoritarismes africains, particulièrement, exposant les sociétés, les Etats et le vivre-ensemble « à la logique de la domination et aux violences »[15].

            Toutefois, fait remarquer l’Auteur,  ces mouvements citoyens ont des défis à relever, défis liés à la durée de leur pouvoir, à l’énonciation d’une pensée politique alternative, à la transhumance politique, à la tentation pécuniaire illicite, à la récupération par les partis auxquels ils n’étaient pas inféodés, au souci d’avoir des leaders (hiérarchie).

            Le deuxième chapitre s’appesantit sur la Pandémie de Covid-19, la vulnérabilité et la nécessité d’inventer l’humanisme unidiversal.  Devant les désastres de la Covid-19, l’Auteur voit la nécessité de penser l’humanisme unidiversal comme fondement de la politique de l’humain. Qu’est-ce à dire ?

            La Covid-19 révèle l’échec de la science et des technologies numériques quant à prévoir le devenir, qui reste instable et incertain. N’eut été cela, la Covid-19 ne serait pas la source des désastres que le monde connait. Malgré les mesures exceptionnelles prises par différents gouvernements (état d’urgence, fermetures des frontières, déblocages des milliards de dollars, d’euros et de francs en faveur des entreprises et des populations), la Covid-19 poursuit son bonhomme de chemin en se mutant.

            De la Covid-19 et de son cortège funèbre, l’Auteur tire une leçon principale : « la primauté de l’humain sur l’économie et sur son corolaire, à savoir la recherche effrénée du profit »[16]. Et puisqu’il en est ainsi, devant l’illusoire maîtrise humaine de la matière et les différentes leçons tirées de la Covid-19 dont l’égalité des corps et la responsabilité vis-à-vis du périssable (biodiversité, l’humain et la cité), l’Auteur propose la politique de l’humain réfutant la hiérarchisation des humains, récuse le traitement des certains selon leurs corps érigés en frontières, et ce à cause du principe de race érigé en « principe de gouvernementalité des sociétés et des humains dans le monde »[17].  De fait, la politique de l’humain s’avère être incontournable selon l’Auteur,  car, considérée dans sa pluralité, elle assurera le vivre-ensemble pacifié. Pour ce faire, cette politique de l’humain, qui se veut une manière libre de vivre visant la promotion des conditions d’une vie digne pour toutes composantes de la cité et combattant toutes les formes de barbaries s’étalant dans le monde entier pour instaurer le règne de l’arbitraire, aura pour fondement l’humanisme unidiversal qui fera « coïncider fraternité, égalité, dignité et justice pour tous les humains dans le monde dont ceux-ci sont redevables et responsables »[18]. Cet humanisme unidiversal renvoie à l’humanisme africain, l’UBUNTU posant « l’ouverture et la reliance du sujet à  tous  les humains dans leurs diversités »[19]. En effet, l’Ubuntu, de par son ouverture et sa solidarité humaine, renseigne que le respect de l’humanité de tout homme et la responsabilité, « afin d’assurer la reprise en main de la destinée humaine collective »[20] sont indispensables, car tous nous sommes terriens ayant une communauté de destin. D’où, la bienveillance se trouve être le pilier du vivre-ensemble inclusif, opposé au vivre-ensemble exlusif, fils du paradigme de la simplicité.

            Par ailleurs, l’humanisme unidiversal, se ressourçant au paradigme de la complexité, manifeste l’unité différentielle des humains dans le monde et « prône le respect, la bienveillance universelle, la solidarité et le cosmopolitisme »[21], affirme l’Auteur. De ce fait le monde, renchérit l’Auteur à la suite du Pape François, doit être conçu et vécu comme « la maison commune »[22].

            Cela étant, l’on devinera que l’Auteur pense un nouvel humanisme « pour asseoir la politique de la vie, celle qui réinvente les conditions d’une vie bonne pour tous et de mieux vivre-ensemble »[23]. N’est-ce pas là relever  le défi de l’après Covid-19 ? Oui, ainsi estime l’Auteur.

            Le troisième chapitre a mis en relief les désastres du principe de la différence et de la logique de la domination appliqués à la gouvernementalité des humains à l’épiderme noir et a pour titre Le corps de l’Autre que soi et la politique.

            L’Auteur montre comment le paradigme de la simplicité, ancrage des discours sur l’altérité, est à la source de certains désastres. Source d’épistémologies binaires, disjonctives, réductrices et exclusives, le paradigme de la simplicité a induit le principe de race pour en faire un principe d’organisation politique, de division du travail et de distribution des richesses[24].

            L’Auteur, pour bien illustrer le principe de race, part de la philosophie du corps. Platon, de par sa conception dualiste de l’être humain, fait du corps un obstacle à l’accès à l’épistémé, la connaissance véritable. D’autres philosophes comme Aristote, Descartes, Kant, Hegel, etc. emboîteront ses pas pour produire des réflexions dépréciatives de certains corps « dont le statut ontologique a été ramené au corps de honte »[25], voire de « l’esclavage »[26]. De ce fait, le corps robuste, musculaire, sera identifié à l’esclavage.

            L’Occident s’étant défini comme « Regard pur », assigna aux « Autres », en partant de leurs corps objectivés, des positions sociales dans la hiérarchie  des êtres et construit son savoir moderne sur ces « Autres en cherchant à savoir, entre autres, « si l’Africain (le Noir) se situait dans l’humanité ou hors d’elle »[27]. Il en sort une différence radicale entre l’Occidental et l’Africain qui exclut ce dernier de l’humanité.  Si l’africain peut être considéré comme un être à part, c’est parce qu’il a une identité se reposant sur sa coutume. Et pour devenir un homme à l’instar de l’Occidental, l’Africain doit subir et accepter la mission civilisatrice, et ce par « un processus de conversion, d’assimilation et d’intégration. L’Africain se verra avec l’œil de l’Occidental. C’est le règne de la violence symbolique.

            Par ailleurs, l’Auteur tient à souligner que cette attitude occidentale engendrant des désastres, a des enjeux et lance des défis au statut du corps de l’Africain particulièrement. Dans le monde capitaliste, l’homme à l’épiderme noir est réduit à une valeur d’usage et d’échange ; il est un être humain inférieur pouvant être privé « du droit de respirer dans l’espace public »[28] ; il ne peut pas cohabiter avec l’Occidental ; la pandémie de la Covid-19 doit ralentir la démographie africaine incontrôlée ; il y a la disqualification de l’interculturalité et le maintien des inégalités. Comme enjeux, on légitime le principe de race comme opérateur de gouvernementalité (impossibilité de l’égalité réelle et d’une société commune entre Européens et Africain, cf. De Tocqueville). On échafaude des postures étalant des tensions entre identité tribale et citoyenneté « au point de nourrir une logique de domination (je souligne) au travers des violences exercées sur les corps des sujets »[29].

            Ceci dit, un défi est lancé à la pensée : « Celui de penser la politique de l’humain  »[30]. Cela consiste à penser à une politique d’ouverture des conditions « du mieux-vivre-ensemble de tous les humains dans le monde en partage »[31]. Autrement dit, cette politique de l’humain doit aller à l’encontre du paradigme de la simplicité, source des binarismes, des préjugés, des discriminations et des bioségrégations. L’Africain ne peut être reconnu comme humain à part entière en renonçant à son identité, à son héritage culturel, à sa mémoire. Il ne doit jamais se convertir à la mémoire jugée supérieure, celle du soi-disant « homme auto-défini Regard éveillé à toutes les correspondances »[32], n’en déplaise à Socrate, Platon, Hegel, Hume, Kant, De Tocqueville, Mattei. Et pourtant la Covid-19 a mis à nu les mensonges, les impuissances des pouvoirs publics, les inégalités, les injustices sociales et économiques « au cœur de toutes les sociétés dans le monde qui a pourtant érigé l’ordre économique en une religion planétaire et en voie royale de rédemption collective »[33].

            Le quatrième et dernier chapitre, intitulé Reprendre la question de l’humanisme pour fonder le vivre-ensemble en Afrique, par l’approche complexe inspirée d’Edgar Morin, veut proposer un autre modus vivendi pour l’Afrique dans et avec le monde rompant avec « les conformismes logiques »[34], mais armé de la « logique du devoir être »[35].

            « Pour fonder le vivre-ensemble en Afrique », l’Auteur s’arme du paradigme de la complexité intégrant le local dans le global et révélant la complexité dans les parties[36]. Ce paradigme convoque l’interculturalité qui est « la rencontre et l’interaction de diverses cultures donnant lieu à la mixité, au brassage et à la compréhension intersubjective, au départ de l’idée de la coappartenance des humains à la communauté de l’identité terrienne »[37].

            L’Afrique, pour l’Auteur, vit au rythme de l’interculturalité en dépit du principe de race et des populismes. On y construit, selon l’Auteur, un vivre-ensemble trans-lignage et trans-ethnique. D’où l’Auteur pense que l’Afropolitanisme y engendrera le cosmopolitisme. Cependant, reconnait l’Auteur, il y a des défis à relever dont la démocratie comme culture à bâtir, le principe de race à radier, la banalisation de la mort à proscrire, la bienveillance à instaurer et la justice envers le semblable à cultiver.

            Comme multiplicité dispersée dans le monde, l’Afrique n’est pas une tabula rasa, mais un « carrefour de cultures, un lieu de problématisation de savoirs et de complexification des épistémologies. Elle est la mesure des valeurs données pour  universelles et seules fondatrices du vivre-ensemble humain dans le monde »[38]. Elle fait de ses humiliations subies une force pour agir dans le monde afin de « contribuer à changer la voie qui a conduit aux lézardes sociales dans le monde et construire un monde habitable et partageable pour tous les humains [un autre monde est possible à partir de l’Afrique ?] »[39].

            Fabrique du vivre-ensemble, l’Afrique est celle de Dispersion et d’Immersion actualisant l’insociable socialité, chère à E. Kant. Espace de rencontres et de recompositions des cultures, l’Afrique prône la sociabilité par la réalisation morale de l’humanité en chacun des hommes confrontés à l’insociabilité nourrie des fanatismes, des populismes, des nationalismes et des violences meurtrières[40].

            Contre et grâce à la crise entropologique accroissant les désordres et les incertitudes, l’Afrique engendre un cosmopolitisme grâce aux déplacements des êtres humains, à la diffusion des codes linguistiques. Ainsi les cultures s’ouvrent les unes aux autres. En outres, fait savoir l’Auteur, ce cosmopolitisme se transfigure en Afropolitanisme qui n’est rien d’autre que « la modernité africaine faite d’emprunts extérieurs et d’un réassemblage des éléments africains »[41].

            Mettant en relief « l’ailleurs (souligné par l’Auteur) dans l’ici et vice versa  »[42], le cosmopolitisme, au dire de l’Auteur, « se développe et s’enracine comme une nouvelle culture »[43] capable d’arracher l’Afrique postcoloniale aux sollicitations des rationalismes ataviques. De ce fait, pense l’Auteur, cette forme de cosmopolitisme fait voir que l’Afrique n’est pas « un bloc géographique »[44] nommé « continent noir »,  mais « une multiplicité dispersée dans le monde complexe »[45].

            Et puisqu’il en est ainsi, les « défis pour bâtir l’humanisme unidiversal et le vivre-ensemble dans le monde »[46] sont à relever. C’est, entre autres, savoir  asseoir la politique de l’humanité, construire le vivre-ensemble au diapason de la complexité historique et anthropo-culturelle des sociétés africaines, rejeter le principe de race « justifié par quelques théoriciens comme moyen efficace de gouverner les territoires et les populations »[47], résoudre l’impasse de la crise de la bienveillance et de la justice pour le semblable « dans un contexte de construction des antagonismes symboliques et réels »[48], résoudre la question de la précarisation des jeunes et réduire les inégalités entre les strates sociales[49].

            Ces défis étant relevés, on aura « un vivre-ensemble inclusif »[50], suppose l’Auteur. De ce fait, l’Auteur pense avoir mis en relief le sens de l’Afrique, laquelle Afrique qui refuse de vivre sa Renaissance à partir uniquement de l’altérité africaine, mais qui se veut une « multiplicité inscrite dans la complexité du monde qui la façonne et lui impose de penser et de promouvoir un vivre-ensemble humain qui lui permet de prendre davantage part à la construction d’un monde partageable par tous et, au demeurant, à la réalisation morale de l’humanité de l’homme »[51]. Ceci dit, l’Auteur refuse les « idéologies du repli sur soi et de l’enfermement dans la différence et la victimisation »[52] . Et l’Auteur propose la rédemption de l’Afrique : avoir la volonté de « réactualiser les capacités africaines d’auto-invention, considérant que l’Afrique est une multiplicité inscrite dans la complexité du monde global »[53].

            De ce qui précède, l’on saura comprendre que l’Auteur milite pour la création « des sociétés ouvertes respectueuses de la diversité subjective et de la pluralité des points de vue sur la gestion de l’avenir de la cité »[54]. Et son point de vue devant cette pluralité est celle de créer des sociétés démocratiques résistant continuellement contre « le principe de race, les autoritarismes, la précarité, la misère, le populisme et le fondamentalisme »[55]. Il y va de l’instauration et de la promotion de la POLITIQUE DE L’HUMANITE ou de l’HUMANISME UNIDIVERSAL.

            De tout ce qui précède, l’on dira, sans être contredit par l’Auteur lui-même, qu’il s’est donné et se donne toujours  pour tâche de « penser le présent et le futur comme lieux de réalisation de l’humanité partagée »[56].


 

QUE PENSER DE LA TENEUR DU LIVRE ?

            La teneur du livre justifie le titre de notre note de lecture. Le philosophe n’est pas cet homme qui, regardant de sa fenêtre le naufrage du bateau, devient le témoin pour raconter ce qu’il a vu. Le sens d’être du philosophe, dans le cas sous examen, est de voir le sens ou la direction que prend l’histoire humaine afin de lui donner un autre sens, celui de la signification, et ce en proposant une piste de solution , car , à la suite de Wittgenstein II, le philosophe a le rôle de montrer à la mouche la voie de sortie de la bouteille. En effet, en appliquant le paradigme de la simplicité dans la gestion de la res publica, les principes de race et de différentiation nous ont fait entrer dans une « bouteille » dans laquelle nous nous battons et dans laquelle la Covid-19 est venue empirer notre situation infrahumaine. Pour donner une « nouvelle orientation » ou une « signification » à notre vivre-ensemble, le philosophe Emmanuel Banywesize Mukambilwa, nous montre le chemin, celui de la Politique de l’humanité fondé sur l’Humanisme unidiversal, fruit du paradigme de la complexité. Voilà l’essence du philosophe, voilà son sens d’être, voilà sa nature sans laquelle il ne serait pas philosophe, nature résumée en ceci : voir beaucoup, entendre beaucoup, lire beaucoup et voir tout, après, sous un nouveau soleil, celui de la Politique de l’humanité assise sur l’Humanisme unidiversal, une autre voie de l’Humanisme régénéré prôné par Edgar Morin.

            Par ce livre, le philosophe congolais engendre un concept dont il est le « père » ad vitam : humanisme unidiversal. Il est le second, car le premier est Organisaction, fruit de ses recherches doctorales. Notre souhait est celui de voir ces deux concepts être développés dans d’autres productions scientifiques ou de voir les chercheurs en faire des sujets ou objets de recherche scientifique..

            Le philosophe Emmanuel Banywesize, par ce livre, nous révèle une nouvelle face de son être dans le vivre-ensemble inclusif : il est aussi philosophe de l’histoire et de la politique. D’où, ce livre est un outil de travail pour tout acteur des mouvements sociaux, pour tout acteur politique et pour tout chercheur d’un « Autre monde possible ».

            Je souhaite un bon vent à son livre.

Professeur Ordinaire Abbé Louis MPALA Mbabula, Philosophe, Université de Lubumbashi, Lubumbashi, le 15 mai 2021



[1] E. MALOTO, cité par E. BANYWESIZE Mukambilwa, En finir avec la politique de différence en Afrique : leçons des mouvements sociaux et de Covid 19, Paris, Cygne, 2020, p. 29.

[2] BANYWESIZE Mukambilwa, En finir avec la politique de différence en Afrique : leçons des mouvements sociaux et de Covid 19, Paris, Cygne, 2020, p. 29.

[3] Ibidem, p. 12.Je souligne.

[4] Ibidem, p. 12.

[5] Ibidem, p. 11.

[6] Ibidem, p. 113.

[7] Ibidem, p. 101.

[8] Ibidem, p.24.

[9] Cf. Ibidem, p. 34.

[10] Cf. Ibidem, p. 13.

[11] Ibidem, p. 36.

[12] Ibidem, p. 50.

[13] Ibidem, p. 51. Je souligne.

[14] Ibidem, p. 53.

[15] Ibidem, p. 30.

[16] Ibidem, p. 62.

[17] Ibidem, p. 30.

[18] Ibidem, p. 12 et 77.

[19] Ibidem, p. 77.

[20] Ibidem, p. 78.

[21] Ibidem, p. 79.

[22] Ibidem, p. 80. Je souligne.

[23] Ibidem, p. 80.

[24] Ibidem, p. 83.

[25] Ibidem, p. 84.

[26] Ibidem, p. 85.

[27] Ibidem, p. 93.

[28] Ibidem, p. 82.

[29] Ibidem, p.

[30] Ibidem, p. 108. Je souligne.

[31] Ibidem, p. 109.

[32]Ibidem, p. 109.

[33] Ibidem, p. 110.

[34] Ibidem, p. 113.

[35] Ibidem, p. 113.

[36] Cf. Ibidem, p. 114.

[37] Ibidem, p. 117.

[38] Ibidem, p. 132.

[39] Ibidem, p. 132.

[40]Cf. Ibidem, p. 134.

[41] Ibidem, p. 141.

[42] Ibidem, p. 141. Souligné par l’auteur.

[43] Ibidem, p. 141.

[44] Ibidem, p. 142.

[45] Ibidem, p. 142.

[46] Ibidem, p. 142.

[47]Ibidem, p. 145.

[48]Ibidem, p. 146.

[49] Cf. Ibidem, p. 146.

[50]Ibidem, p. 148.

[51]Ibidem, p. 148.

[52]Ibidem, p. 148.

[53]Ibidem, p. 148.

[54]Ibidem, p. 149.

[55]Ibidem, p. 149.

[56]Ibidem, p. 151.